Claire Philip

Bien des années avant que la malédiction du sort noire ne soit lancée pour la première fois par la méchante Reine Regina, vivait au cœur d'une ville portuaire du nom de Port Bennett, une jeune enfant venant de perdre son père. Massacré par la meute des Enfants de la Lune qu'il traquait sans relâche depuis plusieurs lunes, le chasseur d'ombre laissait derrière lui veuve et orphelins en bas âge. Trop fière pour accepter la moindre aide pécuniaire, la jeune veuve décida d'élever seule ses deux enfants tout en travaillant dans une taverne en parallèle afin de subvenir aux besoins de sa famille. Quelques années plus tard, le royaume connut une nouvelle période de guerre et lorsqu'il fut en âge de prendre les armes, Corbin l’aîné fût enrôlé pour rejoindre les rangs de l'armée. Comme tant d'autres avant lui, il périt sur le champ de bataille à la suite d'un véritable carnage engendré par les ogres. En tout cas, ce fut la version de l'histoire que leur exposa un gradé lorsqu'il vint rapporter la bague appartenant au soldat décédé. Unique vestige de son passage ici-bas puisqu'il n'y avait nul cadavre à mettre en terre. Cette fameuse bague revint à Claire, dont le doigt trop fin pour l'y conserver la contraint à la suspendre au bout d'une chaîne passée autour de son cou. Le souvenir de son frère restant ainsi conservé non loin de son cœur.

Un chagrin bien vite assourdi par une éreintante formation de chasseuse d'ombre sous la houlette de son oncle par alliance. Lorsque vint l'âge de recevoir une première mission, Claire s'en vit confier une d'importance et non des moindres. Tandis qu'elle réfléchissait à la manière d'aborder sa tâche, ce fut sa cible qui lui fournit l'opportunité de l'accomplir sur un plateau d'argent. Ayant réussi l'exploit de se faire remarquer favorablement par la maléfique princesse Cora, celle-ci lui offrit de l'introduire auprès de la haute société. En échange de cette grande faveur, Cora exigeait de sa personne qu'elle se lie d'amitié avec son unique enfant et de l'espionner en son nom. Claire se saisit de cette occasion tant pour sa mission que par désir d'établir des liens indispensables pour assurer un meilleur avenir à sa mère. La jeune roturière fit la connaissance de Regina quelque temps plus tard lors d'une rencontre minutieusement organisée en amont. Les deux jeunes femmes discutèrent longuement cet après-midi-là, s’apprivoisent progressivement au fur et à mesure de la conversation. Lorsque vint finalement l'heure de prendre congé, la promesse de se revoir rapidement fut échangée. Cette amitié à peine éclose alla en croissant au fil de nombreuses rencontres se succédant par la suite. Elle n'obtint véritablement la confiance de Regina, que la fois où elle prit sa défense lors d'une réprimande de la mère à sa fille au sujet d'une obscure histoire de friandises.

À la suite d'un hiver particulièrement rigoureux, les deux amies accueillirent avec joie les premiers signes du printemps. Et avec eux, le triomphe de l'armée contre les ogres qui marquait ainsi la fin d'un carnage sévissant depuis de bien nombreuses années. Histoire de profiter de cette douce chaleur printanière, elles décidèrent ce jour-là d'effectuer une longue promenade à cheval durant laquelle, elles gravirent une colline afin d'y admirer la vue offerte sur la forêt enchantée. Apercevant le château du roi Léopold au loin, Claire le fit joyeusement remarquer à son amie au détour de la conversation. Voyant la réticence de son interlocutrice à parler du couple royal voisin, elle réussit à obtenir ses confidences en l'assurant de son amitié à son égard. Regina lui confia alors ses craintes de voir Cora un jour se venger du Roi et surtout de la Reine Eva en raison des antécédents de sa mère avec eux. Au détour d'un chemin, elles firent la rencontre d'une dame aveugle à qui elles proposèrent tout naturellement de la raccompagner jusqu'à sa demeure. Construite avec des matériaux surprenants - le pain d'épice étant rarement usité dans le bâtiment - Claire ne put se résoudre à décliner la proposition d'une collation en guise de remerciement tant la curiosité était grande. Est-ce malgré les mises en garde de Régina !

Généreuse de nature, la jeune Fairchild désirait une fois encore rendre service en aidant à la préparation du chocolat chaud. Poussant la porte menant à la cuisine dans l'idée d'y rejoindre leur hôtesse en pleine préparation, elle y fit la macabre découverte d'une pile de crânes appartenant autrefois à des humains entassés dans le coin de cette pièce. Regina, qui la suivait de près ne réussit à retenir le hurlement d’effroi lui venant aux lèvres, attirant de ce fait l'attention de la sorcière. Les événements s’enchaînèrent bien trop rapidement par la suite et d'une manière si confuse que ni Regina ni elle n'en conservaient des souvenirs clairs et précis. Seule la feinte réalisée par le sacrifice de sa précieuse bague et qui avait permis d'attirer la sorcière à l'intérieur d'une de ses horribles cages - ainsi que leur fuite - revenait régulièrement à la surface de sa mémoire. Bouleversée par cette perte, la brune lui confia l'histoire liée à cette objet d'une si hautes valeurs sentimentales à ses yeux qu'en retour, Regina lui avoua son désir de se voir enseigner l'art de la magie afin d'obtenir une manière de se protéger contre sa tyrannique génitrice. Bien plus tard, la chasseuse d'ombre dévoila ces confidences à Cora qui, dans un accès de colère l'accusa d'avoir elle même instillée cette idée dans l'esprit de son enfant. Allant même jusqu'à la menacer de la renvoyer à Port Bennett en guise de représailles. Claire qui ne désirait nullement quitter la compagnie de Regina qu'elle avait appris à aimer telle une véritable amie, supplia la sorcière à genoux de lui permettre de rester à ses côtés. D'une main de maître, Cora réussit à lui faire conclure un nouvel accord en échange de son pardon ...

Lors d'une pluvieuse soirée estivale, Claire fut conviée à accompagner son amie à un bal royal en l'honneur du prince Edward d'Andalasia. Vêtue d'une belle robe de soirée dont la simplicité détonnait avec les toilettes dispendieuses des autres convives, la roturière fut présentée comme tant d'autres avant elle a leur hôte. Un unique regard partagé suffit pour que l'alchimie naisse entre les deux jeunes gens à cet instant-là. Bien qu'ils furent séparés physiquement en ce début de soirée par le ballet incessant des courtisans, ni l'esprit ni le cœur ne réussirent à se détacher de l'autre. Parvenant finalement à s'échapper des griffes acérées de toutes ces nobles demoiselles et de leurs marieuses de mères, le prince vint à sa rencontre. D'un galant geste et d'un franc sourire, Edward la saisit par la taille afin de la conduire jusqu'à la piste de danse. Ils dansèrent une valse puis la suivante, celle qui lui succéda et encore une autre. Enchaînant ensemble les pas en discutant, riant, chantant. L'amour était bien au rendez-vous entre ces deux-là. Lorsque le carillon de minuit sonna, le beau prince déposa un genou à terre devant sa belle ainsi que la foule ébahit. Par ce simple geste, il venait de désigner celle qui prendrait place sur le trône à ses côtés. Quand l'on croise un beau matin l'être que l'on attend depuis toujours, pour que deux ne fassent plus qu'un Claire lui prouva son amour d'un tendre baiser sincère en guise de réponse à cette inattendue demande en mariage.

Quelques heures avant que ne soit célébrée son union avec le prince Edward, une Cora courroucée vint la trouver dans les jardins princiers où Claire y chantonnait gaiement. Installée sur la margelle en pierre d'un puits, elle leva la tête de la couronne de fleurs qu'elle confectionnait. Son interlocutrice lui fit comprendre sans ambages qu'une petite paysanne sotte dans son style n'avait nullement sa place sur un trône et que cet honneur aurait dû revenir à sa fille Regina. Qu'elle avait intrigué longuement en ce sens et qu'elle ne permettrait pas à quiconque de contrecarrer ses manigances. D'un geste de la main, elle fit choir en arrière la jeune fiancée qui disparut à l’intérieur de l'ancien puits. De bien piètres représailles de la part d'une sorcière de la trempe de Cora pensez-vous. Eh bien, sachez que vous vous trompez puisque ce fameux puits était loin d'être des plus ordinaires. Il s'agissait d'un puits enchanté dont la magie instable et hasardeuse servait de portail de téléportation vers un monde où ne l'on vivait jamais ensemble heureux jusqu'à la fin des temps. Sa vengeance désormais accomplie, la sorcière disparut dans un nuage de fumée violette. Quant à la magie fluctuante, elle venait de transporter cette pauvre Claire bien des années plus tard en un lieu nauséabond, humide et sombre.

Visage, chevelure, vêtements crottés et empestant l'eau croupie, c'est ainsi que la jeune femme répugnante parvint à s'extraire en partie des égouts de Manhattan. Abasourdie, Claire contemplait non sans une certaine frayeur l'étrange monde s'offrant à sa vue. Il y avait des sirènes dont le son strident lui blessait les oreilles et que dire de ce kaléidoscope de lumières clignotantes qui lui faisait poindre un début de migraine. Et toute cette foule qui la dévisageait avec insistance telle une déséquilibrée échappée d'un asile psychiatrique. Se ressaisissant un peu, elle émergea la partie inférieure de son corps restée au niveau des égouts avant de se relever. Elle sursauta lorsque lui parvint le bruit d'un klaxon provenant de l'un de ses chariots insolites, construit uniquement dans un affreux métal jauni par le temps. La Fairchild battit une fois des paupières, puis une seconde avant de se jeter en arrière, évitant ainsi le véhicule qui se ruait en sa direction. Trop tard, le mal était fait ! Fuyant le carambolage qu'elle venait d'engendrer, la jeune femme quitta les lieux de l'accident sous les insultes des personnes heurtées durant sa fuite. Alors que demandant son chemin, la brune fut happée par un mouvement de foule l’entraînant jusque dans les méandres du métro new-yorkais.

Parvenant à s'échapper de cette monstruosité de métal qu'était la rame de métro, Claire gagna la sortie en panique. Ignorant qu'elle se trouvait à présent à de nombreuses stations de sa position initiale. Le quartier défavorisé était sombre, sale et silencieux aux antipodes de la luxuriante artère dont elle avait été contraint de s'éloigner. Totalement perdue au milieu de ses immeubles, elle se mit à marcher le long de la route sans prêter attention à cette dernière. Quelquefois une infortune procure des avantages ! Alors que l'accident fut frôlé de près, la providence s'incarna sous les traits d'un bon samaritain et d'une adorable fillette. Ce soir-là, il lui offrit le gite ainsi que le couvert et vaincu par la fatigue de cette stressante journée, elle rejoignit les bras de Morphée sur son canapé. À l'aube, s'éveillant la première, Claire décida d'explorer cette bien étrange chaumière et découvrit une salle d'eau enchanteresse. Bénit soit la fée Canalisation dont la magie faisait jaillir une eau naturellement chaude directement de l'un des murs de la pièce. Par la suite, les journées se suivirent mais ne se ressemblèrent pas. L'expatriée apprit à s’intégrer à ce monde moderne et nouveau, lorsqu'elle prit conscience qu'il n'y aurait nul retour en la forêt enchantée. Au fil du temps, une certaine affection envers Robert naquit qui évolua en idylle avant de se conclure par une union deux années plus tard. Malheureusement, ils ne vécurent pas heureux à jamais puisque au bout de cinq années de mariage, le divorce fut prononcé.

N'ayant plus accès à la bonne fée marraine Carte de crédit, Claire du devenir très rapidement indépendante financièrement. Pour cela, elle passa les concours adéquats afin de devenir une chasseuse de primes patentées. Trouvant en cette vie de nomade fort plaisante, l'épanouissement qui lui manquait tant pour se sentir heureuse. Certes, il n'y avait point de créatures surnaturelles en ce bas monde mais, la noirceur humaine pouvait revêtir bien des apparences. Autant employer sa formation de chasseurs d'ombres pour la bonne cause plutôt que de faire disparaître une partie de son être. Traquant la piste de sa cible actuelle jusqu’à l'état du Maine, elle fut forcée à faire halte dans une petite ville du nom de Storybrooke par un jour pluvieux de septembre.